VOS SOUVENIRS IMPORTANTSBlonde.Elle n’avait alors que ses yeux de bleus.
Elle ne se faisait pas des teintures au gré de ses humeurs.
Elle avait des boucles blondes comme un petit ange.
Elle semblait presque sage.
Ariane n’était alors qu'une enfant, une adorable enfant. Elle avait une jolie petite robe, en un style shiro lolitachoupinou. Bref, elle était tout joulie. Et même qu'elle avait des chevilles toutes fines, d’abord. Elle ne parlait pas encore français.
- D’am soñj marv eo, ma dousig. (Je pense qu'il est mort, ma douce.)
Elle regardait son petit lapin qui ne bougeait plus. Elle regardait son corps inerte. Espérant de tout son petit cœur d’enfant qu'il ne faisait que dormir. Et qu'il avait changé de façon de dormir. Qu'on ne voyait plus la fréquence de ses inspirations. Qu'il dormait.
- N’eo ket gwir ! N’eo ket posubl ! N’eo ket marv ! (C'est faux ! C'est pas possible ! Il est pas mort !)
Et en disant cela elle frappait sa mère, de ses petits points d’enfant. Pour qu'elle retire ses paroles, pour qu'elle se ravise, pour qu'elle lui dise que c’était une blague. Une blague de très mauvais goût, parce qu'il ne pouvait pas mourir, non, vraiment pas. C'était son seul ami, sa seule compagnie, la seule chose qui l'empêchait de basculer, qui la maintenait à la vie. Et puis lui, il ne se plaignait jamais de ne pas comprendre ce qu'elle disait Ariane. Vu qu'Ariane ne parlait que breton. Il la comprenait. Pas comme tous ces gens étranges dans la rue qui parlaient une langue pas belle. Pas comme tous ces gens qu'elle ne voulait pas voir, parce que le breton, ils ne connaissaient pas et que du coup, il la prenait pour une attardée, pour une autiste.
- Ma neuze... N'eo ket grevus. Posubl eo adkavout unan. (M'enfin... Ce n'est pas grave. On peut en reprendre un autre.)
Le visage horrifiée de la gamine en disait long. En ravoir un ? Pardon ? Qu'insinuait-elle là ? Que racontait-elle ? De quoi PARLAIT-ELLE ? Elle venait de dire qu'il était mort. MORT. Quand elle disait "un", elle parlait de le remplacer par un autre ? Un vulgaire animal, une sorte de lapin idiot qui ne la comprendrait pas ? Celui-ci ne pouvait être remplacé ! Celui-ci la comprenait. Il était unique. Même s'il n'avait jamais eu d'autre nom que dousig, aelig, ou autre sobriquet de ce style.
Rouge.On aurait cru que ses cheveux dégoulinaient de sang lorsqu'elle les passa sous l'eau. La couleur dégorgeait et restait étonnement vive sur sa tête. La coloration n'était encore que très récente.
Un éclat de folie brillait au fond de ses yeux bleus.
C'était une adolescente.
Le lapin était mort. Sa raison était morte. Elle s'était résignée. Résignée à espérer qu'un jour on cesserait de la prendre pour une attardée pour la simple raison qu'elle ne parlait que breton. Et elle avait basculé dans l'autre extrême, s'était lancée corps et âmes dans son apprentissage des langues. Irlandais, Gaélique écossais, Français, Anglais, Gallois et Espagnol. Avec plus ou moins de facilité. Avec plus ou moins de difficulté.
Et maintenant qu'elle était capable de dire une phrase en français sans se reprendre cent sept fois, ni hésiter durant cent sept ans, elle semblait presque être une adolescente ordinaire. Sauf qu'elle avait les cheveux d'un rouge sang. Elle avait fini par se laisser faire, se laisser être formatée par la société. Elle avait fini par rentrer à l'école, au collège, au lycée. Elle s'était découverte une nouvelle passion, les mathématiques, l'informatique, le codage, tout ce qui ne nécessitait pas de maîtriser une langue ou une autre pour se faire comprendre.
Bleu.Elle ne comprenait rien, ne suivait rien, ne voulait pas comprendre. Elle était désormais censée être une adulte. Mais elle ne voulait pas être une adulte. Chaque année, lors de son anniversaire, elle se réveillait en se disant "Nouveauté cette année, je n'ai pas un an de plus, j'ai toujours le même âge." Mais rien n'y faisait, elle grandissait, elle vieillissait, elle devait prendre ses responsabilités maintenant qu'elle était majeure.
Mais elle ne voulait pas. Elle n'était pas d'accord. Seulement, on ne lui avait jamais demandé son avis. Son avis, on s'en fichait. Elle partait en vrille, majestueusement. Repensant chaque jour à son lapin sans nom, son lapin tout blanc qui ne pourrait jamais être remplacé. Elle en était arrivée à une conclusion. Rares étaient les êtres vivants qui ne pouvaient être remplacés. La plupart de ceux qu'elle côtoyait ressemblait étonnement à de simples clones. Alors qu'importe que ce soit l'humain 1 ou l'humain 2 qui lui sert de voisin dans les transports en commun. Ils étaient identiques. Ils ne parlaient pas breton. Aucun d'entre eux.
A force de penser ainsi, elle était devenue une indésirable de la société. Une exclue. Elle ne suivait pas les règles, n'imitait pas les autres. Quand elle bousculait quelqu'un dans la rue, elle s'excusait en breton, par automatisme. Et systématiquement, elle n'avait qu'un regard apeuré en guise de réponse, en guise de salutation. Et ses boucles bleues n'aidaient pas.
Elle avait entendu parler d'un lieu, où allaient les indésirables comme elle, quelque part en Ecosse, dans ce pays celtique. Elle avait interrompu des conversations, où l'on disait que là-bas, ils parlaient une langue étrange, un peu comme Ariane. Ainsi, il existait encore un lieu en ce monde où la langue bretonne était monnaie courante ?
VOTRE CARACTÈREAriane est chiante, pesante, énervante, épuisante. Elle ne parle que de breton, n'aime que le breton, ne jure que par le breton.
Mais surtout elle est douce, adorable, attirante, excitante, aimante, attachante, presque angélique pourrait-on dire.
Et parfois très froide.
Ariane est surtout imprévisible, en fonction de son humeur, du lieu où elle se trouve, des gens avec lesquels elle se trouve.
Bref, Ariane est arianescochoupichiante.
VOTRE ARRIVÉE AU PENSIONNATElle devait se retenir, ne pas pleurer, ne pas montrer ses larmes, sa faiblesse. Elle devait être forte, forte. Même si elle était forcée de quitter sa Bretagne adorée, pour un endroit où surement personne ne parlerait breton, elle n'entendrait plus jamais l'accent campagnard du fin fond du Léon, elle n'entendrait plus jamais cette prononciation étrange qu'avaient ceux de Vannes. Elle n'entendrait plus les fameuses légendes de son pays au détour d'une rue. Qui saurait qui est Dahut et Gradlon en Ecosse ? Le nom de Saint-Corentin leur seraient surement étranger à tous. Elle devait se retenir, ne pas laisser couler les larmes. Elle trouverait un moyen de rentrer en Bretagne, de continuer à pratiquer le breton. Elle voulait bien tout perdre sauf cela.
Elle avait fini par comprendre, que cette langue étrange dont ils disaient qu'elle usait, n'était autre que sa façon de s'exprimer, un peu à part, un peu bizarre. Qu'il ne s'agissait en aucun cas de son adoré breton. Alors finalement non, elle s'y était pliée. Elle ne tenterait pas de rentrer en Bretagne puisque, de toute façon, cette Bretagne ne correspondait pas du tout à celle qu'elle imaginait, petite. Alors finalement non, elle devait s'y plier et aller en Ecosse, vu qu'elle n'avait nul autre endroit où aller. Peut-être que là-bas au moins, elle ne tomberait pas que sur des clones. Peut-être que là-bas au moins, on ne la prendrait pas pour une folle.
Elle ne pensait pas que ce serait si simple. Elle ne pensait pas que ce serait si rapide. A peine arrivée, elle signa deux-trois papiers, ne prenant guère le temps de les regarder. Et puis, elle y était. Dans ce lieu qui serait son chez-elle désormais.
RP LIBRE"E Kervoial p’oan bihanik
N’ec’h eus ket soñj, o mamm garet ?
Ni ‘yae lies gant un hentig
Bet ar velin, e-mesk an ed.
Ar bleuñv a oa leun a wenen ;
Klemm a rae eskell ar vilin.
‘Hed ar girzhier mourbl ha melen
E serremp mouar hag irin.
E penn an nivarzh troiellus,
E spurmantemp ‘vel un huñvre
Ar mor divent ha lugernus
Gant e ouelioù ruz a Sine.
Ha pa gouezhe an enderv-noz,
En ur ganañ ezh aemp d’ar gêr ;
Ar pennc’hêrioù dija ‘oa kloz…
N’ec’h eus ket soñj, o mamm dener ?"
En de belles lettres calligraphiées, comme si l'encre de son stylo était le pas d'une danseuse, elle avait écrit ça sur le mur de sa chambre. Un hymne au breton, écrit dans un vannetais approximatif. Ce n'était pas sa contrée. Cela ne l'empêchait pas d'admirer l'auteur. Comme elle admirait celui mort à la guerre, dont la lettre d'adieu, était peinte de la même manière, sur le mur adjacent. Elle jalousait les vannetais d'avoir de si bon auteurs. Persuadée qu'elle était que là-bas, le breton était mieux conservé. Alors qu'elle découvrirait bien trop vite, qu'il n'était que plus perdu encore.
- Spoiler:
Sul Vask 1917
Er suhun goahañ em-es paset ér brezél, er suhun santél-man é. Na ti, na toenn, édan un amzér ken kri. É krov 60 eur em-es kousket un eur, ha hoah éh om bet dihunet d’er yeindér, oll en armé goleit a erh. Skuih om d’er marù. Pegourz é tevéo er vuhé-man ?
Skriv e hran deoh a sol ur hoed, e gouéh er melleudir abarh ken puill èl glaù.
Marsé éh es du-hont, pell, o ken pell, kérieu, ha tiér, hag oéledeu… Aman ne houiam ket, ne chonjam ket mui…
Trugaré Doué, nerh on-es ataù d’en-em stleijal ha de hoarhed ar on truegeh.
Kenevo, Iwann, louz é er brezél, chetu. En hani ‘zo é penn on nivérenn, hag e renkehé komz eidom a pen dom skuih, en-des respontet déh é oem fréu. Petra ‘faot deoh, biskoah ne vé genem !
A gallon, YANN.
Elle aimait écrire, dessiner. Avoir cette impression que sa plume dansait sur le support. Il lui arrivait parfois, dans ses moments d'intimités, de se mettre elle-même à danser, ou pire encore, de tenter d'atteindre le niveau d'écriture de ces deux écrivains qu'elle adulait.
Un jour, alors qu'elle avait réussi à sortir, à affronter la foule de clones vivant dans ce monde, sa mère avait pénétré dans son antre secrète. Découvrant ce qu'elle appelait des graffitis, des tags, des blasphèmes. Où était le blasphème dans le fait d'admirer un homme qui avait voulu être prêtre, qui écrivait presque par dépit, et de citer ses écrits ? Elle se mit dans une colère folle. La traitant de malade. Ce fut le deuxième élément déclencheur.
DERRIÈRE L’ÉCRAN• PRÉNOM ou PSEUDO : Mia• SEXE : A définir.• AGE : Tout juste 18 ans • COMMENT AVEZ-VOUS CONNU LE FORUM : C’est Sikachou qui m’a forcée. C’est TOUJOURS de la faute de Sika.